Par sa
situation géographique, l'Arménie
séculaire a de tout temps fait l'objet
des convoitises de ses voisins et des
conquérants d'Asie
centrale.
Blessée,
meurtrie, écartelée, reconstituée, puis
de nouveau démembrée, la population
arménienne s'est toujours relevée par
ses propres moyens devant l'injure
faite à son intégrité morale, physique,
spirituelle et
nationale.
MAIS REMONTONS
A L¹AN 301 APRÈS JESUS
CHRIST:
En effet, cette année-là,
c'est le roi Tiridate III qui siège sur
le trône d'Arménie. le royaume est sous
l'emprise du mazdéïsme et du
paganisme.
C'est alors que le patriarche
Grégoire, père de l'Eglise arménienne,
Saint Grégoire l'Illuminateur, dont la
statue monumentale à été inaugurée le
19 janvier 2005 en la basilique
Saint-Pierre de Rome, successeur de
l'apôtre Barthélémy dans
l'évangélisation arménienne, va
convertir le roi Tiridate à la foi
chrétienne. Une conversion dont la
portée et les conséquences, vont
retentir jusqu'au début du 20ème
siècle.
Si l'Arménie
devient la première nation chrétienne
du monde,1614 ans plus tard, ces
épousailles seront l'une des causes du
premier génocide du 20ème siècle; car
en effet, cet îlot de la chrétienté,
seul obstacle à ce qu'on appellera, le
pantouranisme, constituait une entrave
majeure aux rêves d'expansion de
l'Empire Ottoman sur son flanc Est,
autrement dit, un empêchement à l'union
de tous les pays de langue et de
tradition turques.
MAIS, POUR LES ARMÉNIENS, TOUT
COMMENÇA LE JOUR DU PLUS GRAND DÉLUGE
DE TOUS LES
TEMPS.
Selon la
légende, ils descendraient de Haïk, qui
n'est autre que le petit-fils de Noë,
dont l'arche se serait immobilisée sur
le mont Ararat, actuellement en
territoire turc. Depuis ces temps
immémoriaux, bien des années passèrent,
jusqu'au jour où, Jason le Thessalien.
découvre la Toison d'or. et parmi les
Argonautes, il y a le fidèle compagnon
de Jason. un général dénommé Arménios.
Fidèle d'entre les fidèles, Arménios
attendra le dernier souffle de son
illustre modèle, pour fonder le pays
d'Arménie.
Mais, c'est en
521 avant Jésus-Christ que l'existence
de l'Arménie est avérée par une trace
écrite laissée par l'Empereur des
Perses, Darius. A l'issue de l'une de
ses iniques batailles, il dira :
j'ai vaincu les Arméniens ! et
ce qui fut dit, fut écrit. En fait,
l'Arménie est née de la chute de
l'éphémère royaume d'Ourartou, au début
du 5ème siècle avant notre ère, et dont
l'épicentre se trouvait près du lac de
Van, haut lieu de l'Arménie
historique.
Après avoir
réussi à traverser les siècles malgré
les multiples invasions où rien ne lui
sera épargné, la grande Arménie, qui
s'étendait de la mer Caspienne à la
Méditerranée, en passant par la Mer
Noire, soit plus de 300 000 km2 alors
qu'aujourd'hui, elle représente une
superficie de 29800 km2, perdait ainsi
inexorablement ses terres
ancestrales.
Au 11ème siècle, Byzance avait
annexé plus de la moitié du royaume ;
quand, venus des confins de l'Asie
Centrale, les Turcs Seldjoukides
contraignirent la population arménienne
à se scinder en plusieurs groupes
migratoires. Les uns émigrèrent vers
l'Ukraine et la Hongrie, les autres
vers le sud, dans la région de
l'actuelle Adana, au bord de la
Méditerranée.
La Grande Arménie venant de
passer sous domination mongole, le
prince Ruben, fonde alors en Cilicie le
royaume de la Petite
Arménie.
Durant près de
deux siècles, cette structure de type
féodal, à la croisée des routes
commerciales maritimes, vivra dans une
opulente prospérité jusqu' en 1375,
date à laquelle les Mamelouks et les
Turcomans en prirent possession,
contraignant à l'exil le roi Léon V de
Lusignan.
LES RESTES DE
CE SOUVERAIN D'ORIGINE POITEVINE
REPOSENT AUJOURD'HUI EN LA BASILIQUE
SAINT-DENIS AUX CÔTÉS DES ROIS DE
FRANCE.
Puis, ce fut au tour de
Byzance de subir le joug ottoman. Le 29
mai 1453, à l'âge de 21 ans, Mehmet II
le Conquérant, à la tête de ses
janissaires, s'empare de
Constantinople. C'en est fini de
l'Empire Byzantin. L'Arménie, quant à
elle, se trouve être partagée entre les
Turcs, les Perses et les
Russes.
Désormais,
l¹Europe entre en scène et peut faire
son marché. En 1828, la Russie s¹empare
de la partie orientale arménienne, dont
fait partie Erevan. tandis que la
Turquie, aidée par le Royaume Uni,
récupère à l'ouest, un périmètre allant
de Erzeroum à
Kars..
Ces multiples bouleversements
géo-politiques subis par le peuple
arménien, opérés au gré de l'appétit
des occupants, vont bientôt forger son
identité
nationale.
En attendant
ce réveil, les Arméniens font contre
mauvaise fortune bon coeur. Ils
s'investissent dans le commerce et
l'économie, tout en participant avec
succès à l'administration du pays. Mais
les réformes annoncées se font
attendre, tandis que l'Empire Ottoman
va commencer à perdre de ses
possessions balkaniques. Premier de la
liste, la Bulgarie.
Pour la
Turquie, c'en est trop; d'autant que
parallèlement, les autonomistes
arméniens s'organisent dans le dessein
de reconstituer l'Arménie
historique.
Espoir très vite déçu. En mars
1878, le traité de San-Stefano prévoit
l'autonomie; trois mois plus tard, le
Congrès de Berlin infirme ces
dispositions pour l'application de
simples réformes administratives:
Chypre passe à la Grande Bretagne, qui
promet aux Turcs son soutien contre la
Russie. La trahison est consommée; pour
le contrôle britannique de la
Méditerranée. Ce sera le premier marché
de dupes subi par les
Arméniens.
MAIS DU CÔTÉ DE
CONSTANTINOPLE, ON N'EST PAS DÉCIDÉ À
CÉDER À CE COURANT INDÉPENDANTISTE
PERSISTANT. IL S¹AGIT DE METTRE AU PAS
UNE POPULATION QUALIFIÉE DE TRAITRE À
LA NATION, ACCUSÉE DE CONSPIRATION AVEC
LA RUSSIE.
C'est
ainsi qu'en 1894, alors qu'aucune
réforme n'a été appliquée, sous les
protestations de plus en plus appuyées
des Arméniens, près de 300 000 d'entre
eux seront systématiquement exterminés.
Il est évident que ces crimes ne
pouvaient rester en l'état, sans une
réaction arménienne. C'est ce que fit
le parti révolutionnaire
Dashnaksoutioun en attaquant la Banque
Ottomane de Constantinople le 26 août
1896, afin d'attirer l'attention de
l'Europe. La riposte du sultan Abdul
Hamid fut immédiate : 5 à 7000
Arméniens furent massacrés sur
place.
A cette
époque, le grand humaniste Jean Jaurès
déclarait à la Chambre des Députés :
" C'est parce qu'on n'a pas réclamé
avec assez d'énergie des réformes pour
les Arméniens, que les massacres ont eu
lieu ! ". Il ajoute: " Ce que je
dis là ne sont pas de vaines
prophéties. Il semblait que le Sultan,
averti enfin par l'indignation tardive
de l'Europe, allait suspendre les
massacres arméniens, et M. le ministre
des Affaires étrangères lui avait écrit
au lendemain des interpellations qui
s'étaient débattues ici : "Il ne faut
plus qu'il soit versé une goutte de
sang". Mais il a repris confiance, il
ne vous redoute plus; il voit tout à
coup que vous restez encore ses
meilleurs soutiens et ses meilleurs
amis. Et voici qu'à l'heure même où
nous parlons, les massacres d'Arménie
recommencent, les populations
arméniennes sont massacrées de nouveau,
et le Sultan ne nous permet pas
d'oublier une minute à quelle
collaboration vous vous résignez, en
acceptant l'action des troupes
ottomanes pour la pacification de la
Crète. "
UN LUGUBRE
PRÉLUDE QUI ANNONÇAIT LE GÉNOCIDE DE
1915 ET DE L¹ATTITUDE EUROPÉENNE,
PENDANT, ET APRÈS . MAIS LES MASSACRES
NE SUFFISAIENT PAS AU SANGUINAIRE ABDUL
HAMID. UNE ISLAMISATION FORCÉE
PROMETTAIT LA VIE SAUVE AUX CONVERTIS.
LES AUTRES SERONT ÉCARTELÉS, DÉCAPITÉS,
ÉGORGÉS, ÉVENTRÉS, PENDUS. SANS COMPTER
LE VIOL DES JEUNES FEMMES, ET LES
ENFANTS ASPHYXIÉS , JETÉS À LA
VERMINE.
La
persécution chrétienne à des fins
politiques était bel et bien en
marche.
Et pourtant,
en renversant en 1909 le Sultan Rouge,
le parti révolutionnaire multi-ethnique
Union et Progrès des Jeunes Turcs,
annonçait une nouvelle ère dans les
relations arméno-turques. Il y eut même
des alliances, des accords, 14 députés
arméniens au parlement, l'espoir d'une
société fraternelle et égalitaire. Mais
rien n'y fit. Les massacres
redoublèrent à ADANA en
Cilicie.
Dans un sursaut de conscience,
l'Europe intervint un bref moment pour
rétablir les Arméniens dans leurs
droits. mais le ver avait déjà fait son
oeuvre. Le coeur de la pomme n'y
résisterait plus très
longtemps.
Alors, tandis
que la Turquie se bat sur plusieurs
fronts et perd de son influence dans
les Balkans, le sort des Arméniens et
des autres minorités chrétiennes est
laissé en l'état jusqu'au déclenchement
de la Première Guerre
Mondiale.
Pour les
Indépendantistes, cette nouvelle donne
est l'occasion de revendiquer à nouveau
l'établissement d'une Arménie libre. et
c'est là qu'entre en scène le
triumvirat responsable de l'élimination
de près d'un million et demi
d'Arméniens vivant sur le territoire
turc.
Ils ont pour noms : Djemal
pacha, ministre de la Marine, Enver
pacha, ministre de la Guerre, et Talaat
pacha, ministre de l'Intérieur. Pour
Talaat, le plan est simple. il s'en
explique dans un télégramme envoyé à la
direction du parti à Alep : " Le
gouvernement a décidé de détruire tous
les Arméniens résidant en Turquie. Il
faut mettre fin à leur existence, aussi
criminelles que soient les mesures à
prendre. Il ne faut tenir compte, ni de
l'âge, ni du sexe. Les scrupules de
conscience n'ont pas leur place ici.
"
ENFIN, LE
SECOND TÉLEGRAMME MET DÉFINITIVEMENT EN
LUMIÈRE LES INTENTIONS CRIMINELLES,
PLANIFIÉES, DU GOUVERNEMENT JEUNE TURC
À L¹ADRESSE DES ARMÉMIENS : "Il a
été précédemment communiqué que le
gouvernement a décidé d'exterminer
entièrement les Arméniens habitant en
Turquie. Ceux qui s'opposeront à cet
ordre ne pourront plus faire partie de
l'Administration. Sans égard pour les
femmes, les enfants et les infirmes,
quelque tragiques que puissent être les
moyens d'extermination, sans écouter
les sentiments de la conscience, il
faut mettre fin à leur existence.
"
L'émigration
massive des sujets turcs des Balkans
est l'occasion inespérée d'inciter la
population musulmane à se méfier des
Arméniens, afin d'attiser la haine du
peuple turc contre les infidèles. Dans
certains villages, il est même interdit
de parler l'arménien.
Ainsi, prenant
appui sur la guerre en cours, et malgré
une reconnaissance de la fidélité des
soldats arméniens, dans un document
signé par Enver pacha le 26 février
1915, ces derniers sont désarmés
quelques semaines plus tard, sous
le prétexte de trahison, accusés
d'intelligence avec la Russie.
regroupés en bataillons de travail,
près de 200 000 d'entre eux seront
exécutés. En fait, la Sublime Porte
attendait de ses fidèles sujets, qu'ils
tirent tout simplement sur leurs
propres frères du
Caucase.
Cette
situation intenable déclenche alors le
réflexe d'auto défense de la ville de
Van qui, le 7 avril 1915, instaure un
gouvernement provisoire... Le prétexte
était trouvé.
DANS LA NUIT
DU 24 AU 25 AVRIL, L¹HALLALI EST
DÉCLENCHÉ. C¹EST LA RAFLE DE
CONSTANTINOPLE. 600 INTELLECTUELS ET
NOTABLES ARMÉNIENS SONT PASSÉS PAR LES
ARMES, STIGMATISANT AINSI LE DÉBUT DU
GÉNOCIDE ARMÉNIEN. IL SE PRODUIRA SUR
L'ENSEMBLE DU TERRITOIRE
TURC.
En quelques mois, les hommes,
d'abord emprisonnés, sont exécutés
sommairement ou engouffrés dans les
églises auxquelles on met le feu. Les
femmes, les enfants et les vieillards ,
rassemblés en troupeaux de misère,
direction le désert de Syrie et de
Mésopotamie, comme l'ordonne, la " loi
provisoire de déportation " du 27 mai
1915. Ceux qui acceptent la conversion
à l'Islam sont épargnés, mais pour la
plupart, la mort est une délivrance
face à l'injure de l'abdication de leur
foi.
Et puis des
jeunes garçons sont islamisés par
circoncision forcée. Les jeunes filles
enlevées et violées par des hordes
kurdes et turques. Les plus résistants
marcheront plusieurs mois dans la
chaleur étouffante de l'été 1915,
tandis qu'on pillait leurs maisons et
qu'on s'appropriait leurs
biens.
AFFAMÉS, EN
GUENILLES, DÉLESTÉS DU PEU QU'ILS
AVAIENT PU PRÉSERVER, TRÈS PEU
SURVIVRONT À CE SORT INDIGNE, PLONGÉS
DANS L¹ABÎME DE
L'INDICIBLE.
Des milliers
de survivants, témoins oculaires, ont
raconté leur calvaire. En effet, par
bonheur, pour certains, il y eut aussi
des justes qui sauvèrent des
enfants.
"
l'organisation ad hoc, responsable de
ce génocide planifié des Arméniens ",
avait donné ordre à l'administration et
à la population turque, de ne pas
recueillir ou donner refuge aux enfants
arméniens dont les parents avaient été
anéantis. Ce télégramme portant la
mention " double urgence ", précisait :
" le télégramme une fois lu, doit être
détruit ".
La liste des
exactions physiques dépasse
l'entendement. Ce fut une boucherie.
Squelettiques, ils sont morts sur la
route, ou s'éteignirent dans le désert
de Deir-Eis-Zor, dévorés par les
chacals et les chiens
errants.
Plusieurs
observateurs étrangers dignes de foi,
rapportèrent à leurs pays respectifs le
drame humain qui s'était joué en terre
ottomane. L'Allemagne, alliée de la
Turquie pendant la Première Guerre
Mondiale, avait laissé faire et
censurait les informations, malgré un
rapport accablant du pasteur Johannes
Lepsius. L'ambassadeur des Etats-Unis
en Turquie, Henry Morgenthau, avait
lui-même témoigné, ainsi que le consul
Leslie Davis; de même que des
observateurs britanniques et français,
dont l'ambassadeur Paul Cambon, mais
l'Europe était occupée sur d'autres
théâtres d'interventions; et à vrai
dire, peu influente dans ce contexte
international.
IL FAUT AUSSI
SE RAPPELER LES PAROLES D¹ADOLF HITLER,
LE 22 AOÛT 1939, AVANT QU¹IL N¹ATTAQUE
LA POLOGNE, ET EN PRÉMICES À LA FROIDE
APPLICATION DU GÉNOCIDE DU PEUPLE JUIF
:" Qui se souvient encore du
massacre des Arméniens ?
".
CE MÊME HITLER
QUI, PUBLIANT EN 1925 SON OUVRAGE "MEIN
KAMPF" (MON COMBAT), ÉCRIT EN PRISON,
ÉTAIT LOIN DE SE DOUTER, QU'EN L'ANNÉE
2005, SOIT 80 ANNÉES PLUS TARD,
CELUI-CI DEVIENDRAIT UN BEST SELLER EN
TURQUIE, AVEC PLUS DE 100 000
EXEMPLAIRES VENDUS EN QUELQUES
SEMAINES.
Si l'Allemagne
a su s'honorer en condamnant les crimes
du nazisme, il n'en est pas de même
pour la Turquie et les crimes de
l'Empire Ottoman. Puisque aujourd'hui
même, trône à Istanbul, sur l'impropre
appellation de, " colline des martyrs
", le mausolée du ministre de
l'Intérieur, Talaat pacha,
co-responsable du Génocide des
Arméniens. Il sera abattu à Berlin par
Soghomon Tehlirian, un jeune Armenien
de 23 ans, le 15 mars 1921. Le 3 juin
suivant, Tehlirian est acquitté, le
génocide avéré.
Le 30 octobre 1918, la fin du
premier conflit mondial est scellé par
la signature de l'accord d'armistice de
Moudros. les alliés ont prévu le
démembrement de la Turquie en s'en
partageant le contrôle. Tandis que
l'Arménie côté russe, dite orientale,
obtenait une éphémère indépendance
avant d'entrer dans le giron soviétique
en 1920.
Mais du côté
de Samsoun, située sur les rives de la
Mer Noire, le vainqueur des Dardanelles
ne l'entend pas ainsi. Son nom: Mustafa
Kemal, commandant de la 3è armée. Il
vient d'être nommé gouverneur des
provinces orientales par le sultan
Mehmet VI. Son but, lancer un mouvement
insurrectionnel visant à créer un
sursaut nationaliste. Nous sommes en
mai 1919. Quelques semaines plus tard,
le 3 juin 1919, le triumvirat Jeune
Turc, Djemal pacha, Enver pacha et
Talaat pacha, est condamné à mort par
contumace; et le 5 juillet 1919, c'est
au tour du Comité Union et Progrès,
déclaré responsable des exactions
perpétrées sur les
Arméniens.
En avril 1920,
Mustafa Kemal est désigné à la tête
d'un gouvernement provisoire à Ankara,
tandis que les accords du futur Traité
de Sèvres circulent de chancelleries en
chancelleries. Le 10 août 1920, le
traité reconnaît officiellement
l'indépendance de l'Arménie. un Etat
qui s'étendait sur 70 000 km2. Il
prévoyait également un foyer national
arménien en Cilicie, sous protectorat
français, et la création d'un Kurdistan
autonome.
Mais, Mustafa
Kemal ne l'entendait pas ainsi. Le 22
septembre 1920, les troupes du futur
fondateur de la Turquie, dite moderne,
pénétrèrent en république d'Arménie,
aidées par les Azéris et les
Bolcheviks. en décembre de la même
année, les régions de Kars et d'Ardahan
tombaient entre ses mains. Onze mois
plus tard, le 20 octobre 1921, les
Turcs, chassant les Français de
Cilicie, s'en prirent une nouvelle fois
aux Arméniens, dans l'indifférence
générale.
Inappliqué, le
feu Traité de Sèvres fit place en 1923,
au honteux traité de Lausanne, dans
lequel il ne sera plus question
d'Arménie. Une seconde trahison très
dure à avaler.
Aujourd'hui, les fils et
filles des survivants de ce crime
contre l'humanité, vivent éparpillés de
par le monde. ils se réunissent par
communion d'esprit tous les 24 avril,
depuis 1915, pour commémorer et se
souvenir, que ce jour là, leurs parents
ont subi l'outrage suprême d'un
génocide.
Alors, comme
si cette abjection ne suffisait pas,
non content d'organiser de part le
monde un négationnisme radical forcené,
insultant la mémoire d'un million cinq
cent mille martyrs, l'actuel Etat turc,
renouant avec certaines dérives du
passé qui consistaient à contraindre
les Arméniens à turquifier leurs noms,
sous peine d'extermination, procède à
un nouveau nettoyage , comme si demain,
plus personne n'aurait l'idée
d'imaginer qu'un jour, il y eut ici
même un pays nommé
ARMENIE.
Ainsi,
aujourd'hui, après avoir détruit les
monuments et profané les églises, on
renomme les espèces végétales et
animales, reconnues par le corps
scientifique sous des appellations dont
l'origine est arménienne, pour d'autres
à consonances turques, allant jusqu'à
projeter de débaptiser la ville
historique de Van, en lui attribuant
celui de Douchba, un nom attaché à
l'ancien royaume
d'Ourartou.
Mais ce n'est
pas tout; dans une conférence qui a eu
lieu au parlement de Strasbourg, le 12
avril 2005, l'historien turc, Taner
Akçam, a affirmé " de manière
accablante dans son intervention,
centrée sur les preuves documentées du
génocide, de la formidable entreprise
de falsification et d'invention
d'archives par la Turquie. Il a réfuté
les prétendues incohérences entre
celles-ci et les archives occidentales,
en expliquant clairement que ces
dernières avaient été expurgées et même
fabriquées. Concluant, que ceux qui
s'aventuraient à vouloir consulter ces
archives étaient quand bien même soumis
à des menaces."
Et pour
couronner le tout, la veille de cette
intervention de Strasbourg, le 11
avril, le premier ministre turc, Recep
Tayyp Erdogan, en visite officielle en
Norvège, déclarait : " il appartient
aux Arméniens de faire des excuses à la
Turquie pour leurs allégations de
génocide pendant la Première Guerre
Mondiale ".
ENFIN, POUR
COMPRENDRE JUSQU'OÙ PEUVENT ALLER CES
DÉRIVES, LE CHEF DU GOUVERNEMENT TURC
AURAIT PRIÉ SON HOMOLOGUE ISRAËLIEN,
ARIEL SHARON, DE CONVAINCRE LE
PRÉSIDENT BUSH, DE NE PAS EMPLOYER LE
MOT GÉNOCIDE AU JOUR DU 24 AVRIL 2005.
ON CROIT RÉVER CAR, ENTRE 1895 ET 1923,
CE SONT PRÈS DE DEUX MILLIONS
D¹ARMÉNIENS QUI DISPARAITRONT DE LA
SURFACE DE LA TERRE.
Cette volonté
de nuisance a atteint tous les corps de
l'Etat. Ainsi, le président de
l'Association des parlementaires turcs,
dans un message envoyé à ses homologues
européens, appelle ces derniers à : "
établir ensemble, la non reconnaissance
du génocide arménien
".
POUR LA
TURQUIE, IL NE S¹AGIT QUE DU
REGRETTABLE MASSACRE DE "SEULEMENT" 300
OOO ARMÉNIENS, QUI EUX-MÊMES, AURAIENT
ÉLIMINÉ AUTANT DE TURCS, SINON PLUS ,
une fable qui a fait long feu
!
MAIS CE QU'IL FAUT SAVOIR, C'EST QU'UN
GÉNOCIDE NE TIENT PAS AU NOMBRE DES
VICTIMES, MAIS A LA MÉTHODOLOGIQUE
APPLICATION D'UN PLAN, PAR LEQUEL ON
PROJETTE D'ÉLIMINER UN GROUPE ETHNIQUE
OU RELIGIEUX.
Tandis que
la Turquie frappe à la porte de
l¹Europe, et à laquelle on demande les
réformes démocratiques qui s¹imposent
en matière des Droits de l'Homme, on
assiste à une rigidité de l¹attitude
concernant la question de la
reconnaissance du génocide arménien.
À CE PROPOS,
TANER AKÇAM, NOUS LIVRE UN DÉBUT DE
RÉPONSE : " Entre 1878 et 1918, les
dirigeants turcs ottomans ont perdu 85
% des terres et 75 % de la population
de l¹Empire. Cette période a été vécue
comme l'époque du déshonneur et de
toutes sortes d'humiliations. Dans ce
contexte de ressentiment et
d'aveuglement, la décision du génocide
semble avoir été un acte de vengeance
dirigé contre ceux que l'on considérait
responsables de cette situation : les
Arméniens. On en a fait des ennemis de
substitution, remplaçant les grandes
puissances et l'ensemble des peuples
chrétiens de l'Empire. Les dirigeants
ottomans ont, en fait, liquidé sur le
dos des Arméniens, des comptes qu'ils
ne pouvaient régler ailleurs. Cela
explique l'insistance avec laquelle on
veut présenter la République Turque
comme une renaissance, ou encore comme
un absolu commencement
".
POUR ETRE
COMPLET, IL FAUT SAVOIR QU'UNE
RESOLUTION DU PARLEMENT EUROPEEN DE
1987, REAFFIRMEE LE 1ER AVRIL 2003,
STIPULAIT QUE, " SANS RECONNAISSANCE DU
GENOCIDE ARMENIEN ", TOUTE OUVERTURE
DES NEGOCIATIONS D¹ADHESION A L¹EUROPE
ETAIT EXCLUE. PAR FAIBLESSE EUROPEENNE,
IL EN A ETE AUTREMENT, SPECIALEMENT DU
AU REFUS OBSTINE DES AUTORITES TURQUES
D'AVOIR A AFFRONTER CETTE EPEE DE
DAMOCLES SUSPENDUE COMME PRECONDITION A
L'ADHESION. POUR LA TROISIEME FOIS,
L¹EUROPE CEDAIT AUX EXIGENCES DU
LEVANT. CETTE FOIS SUR L¹AUTEL DES
ECONOMIES DE MARCHE.
POURQUOI TANT D¹OBSTINATION A
REFUTER L'INDENIABLE ET IMPRESCRIPTIBLE
CRIME COMMIS PAR L¹EMPIRE OTTOMAN ?
POUR UNE RAISON TRES SIMPLE : LA
RECONNAISSANCE DU GENOCIDE ARMENIEN
ENTRAINERAIT EN SON SILLAGE DES
DEMANDES EN REPARATIONS ET DES
REVENDICATIONS, NOTAMMENT
TERRITORIALES. CE QUI REVIENDRAIT A
APPLIQUER DE FACTO LES TERMES DU TRAITE
DE SEVRES DE 1920. AINSI, NEE DES
DECOMBRES DE L¹INDICIBLE, LA REPUBLIQUE
TURQUE A CHOISI DE PRENDRE LA GOMME,
PLUTOT QUE DE REDESSINER L¹ARBRE DE VIE
A DEUX MAINS.
ELLE AURA
BEAU FROTTER, ET FROTTER ENCORE, LA
TACHE QUI S¹Y TROUVE , DEMEURE A
JAMAIS,
INDELEBILE.
________________________________________
Jean
Eckian
Né à
Boulogne Billancourt, ancien
journaliste, reporter d¹images, Jean
ECKIAN devient Directeur Artistique
des sociétés discographiques CBS et EMI
Pathé-Marconi. Il a découvert des
Artistes, tels, LES IRRESISTIBLES (My
year is a day), William SHELLER, Roland
MAGDANE, Philippe CHATEL, Joël PREVOST
(Eurovision 1978), Maximilien (Comme un
oiseau qui s¹envole), Karim KACEL
(Banlieue), et a réalisé les disques de
Michel FUGAIN (Ballade en Bugatti,
Attention Mesdames et Messieurs, etc),
Jean-Jacques DEBOUT (Un mot), Charles
DUMONT (Souviens-toi des flons flons),
Georges CHELON (Poète en l¹An 2000),
etc. Directeur de Production de films
publicitaires (Europe 1, Citroën), et
réalisateur de films industriels (Les
90 ans du Fouquet¹s) et de reportages
(l¹Intégration), il écrit ensuite pour
la presse dédiée à la chanson, et a
animé sur MFM, des émissions où il
conte " Les Histoires d¹Amour de
l¹Histoire de France ", et un
éphéméride du siècle passé (Alors
Raconte).
Co-organisateur du
disque " Pour toi Arménie ", Jean
ECKIAN est par ailleurs l'auteur de
scénarios et du livre " Vous êtes nés
le même jour que..." (Editions Jacques
Grancher - Collection: Document-
Actualité.)

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